Le poisson se gâte toujours par la tête… ou la responsabilité managériale dans le niveau de motivation d’une organisation

Article Dimitri

C'est la rentrée. Une rentrée singulière. La deuxième en temps de Covid. La vaccination et ses espoirs d'un côté, les craintes liées aux variants de l'autre, font planer un désormais connu parfum d'incertitude quant aux prochains mois. Le retour au bureau, dans ce contexte particulier, après des mois de télétravail pour certains, est moins naturel. Beaucoup de DRH le confient: l'enjeu est pour eux de faire revenir au bureau, avec envie, les collaborateurs.

Car oui, le télétravail qui désormais fait partie de notre quotidien et de façon pérenne, change la donne, impose une nouvelle grammaire dans le management et les relations professionnelles. Nous avons appris, à marche forcée, à travailler à distance. Nous nous sommes montrés productifs. Alors opérer le retour, n'est finalement plus une évidence. Vivre le collectif physiquement non plus. J'ai été frappé par ce qu'un ami, Directeur Général dans l'IT m'a confié ; l'un de ses collaborateurs, membre du Comité de Direction, lui a dit avec naturel : 

"je ne viendrai pas au bureau cette semaine, j'ai trop de travail". Tellement emblématique de ce que nous vivons.

 

Bien sûr il y a des organisations tentées par l'imposition : refixer un cadre strict, imposer le retour au bureau de façon autoritaire... On sait bien que dans des secteurs, où les talents s'arrachent, c'est impossible. Gare aux organisations, qui voudront retrouver la même organisation qu'il y à 18 mois. L'agilité, la composition entre présence au bureau et nomadisme ou télétravail est désormais une norme. Il faut nous y adapter. Nous organiser. Créer de nouveaux référents et cadres de travail. Lutter contre cela, reviendrait à singer les entreprises qui, il y a 15 ans, ne se sont pas adaptées à l'avènement du digital.

 

Ces derniers mois, j'ai reçu plusieurs briefs assez similaires, que je pourrais ainsi résumer :

"nous avons besoin de remotiver nos équipes, de créer du lien, après des mois de relations distendues - comment pourriez-vous nous aider ?".

J'aurais pu répondre à ces briefs de façon assez attendue (et commerciale), en portant l'effort (qu'il s'agisse de coaching individuel ou d'équipes, de formations ou / et de team building) sur les dits collaborateurs. De finalement répondre directement à ces demandes formulées. Mais j'ai procédé autrement, car en pareil cas, je pense que chercher à travailler sur la motivation des collaborateurs, revient à gonfler un ballon percé : une opération ramenant un semblant artificiel d'équilibre au système; mais en aucun cas d'une efficacité durable, car sans impact sur la cause du problème affectant le système.

 

En effet, l'envie, la motivation, ne se décrètent pas. Les formations ou team building en la matière, seuls, ne sont pour moi que des incantations court-termistes. On doit créer le cadre, propice, au développement de cette motivation, graal managérial par excellence. D'où cette question centrale, que l'on doit se poser : "au sein de l'entreprise, la Direction, le Management, créent-ils les conditions propices au développement et à la pérennité de la motivation des collaborateurs ? De leur envie de revenir travailler ensemble ?". C'est à mon sens, LA question qui nécessite un diagnostic et plan d'action. Et attention : par des "conditions propices" je ne parle pas d'installer un baby-foot, de faire un barbecue ou des cours de yoga au bureau (ce qui peut être par ailleurs très judicieux, mais ne suffit pas à motiver durablement les équipes). Travailler avec les collaborateurs est une évidence. Mais c'est avant tout avec la Direction et les premiers cercles managériaux, qu'il importe de travailler.

 

Oui le paradigme est ainsi posé. Je crois en la responsabilité des dirigeants dans la motivation de leurs équipes. Cette conviction n'est pas accusatoire mais au contraire, l'appel au plein exercice de leur leadership.

 

Alors comment peut-on procéder ? Vous l'avez compris, je recommande de travailler sur la totalité du système (l'organisation) et non pas sur l'une de ses composantes (les collaborateurs). C'est ainsi un coaching d'organisation qui peut à mon sens produire une efficacité rapide et durable. Travailler avec les différentes composantes de l'organisation, pour créer la force motrice de l'envie. Ce processus mêle coaching d'équipes, coaching individuel et apports de formation. Mais surtout, il implique en premier lieu de travailler avec la Direction. La question qui est posée aux organisations est finalement celle du sens. A quoi cela sert-il de revenir au bureau, puisque nous avons démontré notre productivité en télétravail ? Si les salariés en doutent, il faut rassurer, rappeler, inspirer, sur la raison d'être de leur engagement dans l'entreprise. Ces mois de pandémie ont sans doute impacté l'environnement, le marché, de l'organisation. Le moment est sans doute propice à repenser cette quête collective, cette mission, qui doit rassembler les troupes. Il est à mon sens impossible de faire l'économie de cette réflexion dans ce temps nouveau. Ce socle narratif de l'organisation (qui a fait l'objet d'un précédent article de ma part) est un exercice stratégique, car touchant au cœur les salariés. Il est ici question de fierté, de sentiment d'appartenance, de quête collective. Des notions fortes, qui doivent nourrir la quête de sens, inhérente à la réalité du cadre contemporain.

 

Je partage avec vous un Quick Win, un élément à travailler en comité de direction : faire un retour d'expérience (RETEX) sur la façon dont l'organisation a vécu la pandémie. Il a fallu gérer l'urgence, s'adapter, se réinventer... Des équipes, des collaborateurs, ont sans doute amené beaucoup d'innovations, des solidarités se sont crées etc. Il y a nécessairement une formidable matière, qui va pouvoir nourrir la culture, le socle narratif de l'entreprise. Remercier les collaborateurs de leur adaptation, célébrer les réussites et la façon dont la crise a été surmontée, sont de nature à montrer la résilience de l'organisation. Une page à tourner. Des enseignements à tirer. Un récit héroïque à intégrer à l'histoire de l'entreprise. Fixer un nouveau cap, écrire une nouvelle histoire dans un contexte nouveau. C'est la base d'un travail pour donner "envie d'avoir envie" (comme chantait le poète !) ensemble, à nouveau.

 

Et vous ? Comment gérez-vous le retour de vos équipes ? Comment procédez-vous pour redonner l'envie et le sens collectif ? Echangeons, partageons. Je serais ravi de vous écouter et de développer mon approche du coaching d'organisation, adaptée à la reprise d'activité de cette rentrée.

 

Dimitri Aït-Kaci